Doucement mais surement.

Publié le par Mohamed BENTEBRA

MM. Chirac, Sarkozy et Séguin s'accordent sur le nom d'un préfet issu de l'immigration.
 

Cette fois, trois poids lourds, Jacques Chirac, Philippe Séguin et Nicolas Sarkozy, se sont mis d'accord sur un nom : Nacer Meddah, conseiller référendaire 2e classe à la Cour des comptes, a été nommé préfet de l'Aube, au conseil des ministres, mercredi 19 juillet.

Le ministre de l'intérieur, qui avait suscité la polémique et la colère du président en assurant à la télévision, le 30 novembre 2003, qu'il allait nommer "un préfet musulman", s'est félicité, en conseil des ministres, que le premier président de la Cour des comptes ait accepté, "dans l'intérêt de M. Meddah", de laisser partir son secrétaire général adjoint, un collaborateur précieux.

M. Chirac a renchéri sur les qualités de ce fonctionnaire, né en France de parents algériens, qui rejoint, à 46 ans, le département d'un fidèle chiraquien, François Baroin. M. Séguin lui-même, après s'être fait prier plusieurs mois, se réjouit de la promotion de M. Meddah, "un homme remarquable et un très grand fonctionnaire".

La querelle philosophique et sémantique sur le "préfet musulman" serait donc éteinte. M. Sarkozy, qui s'était naguère vanté d'avoir employé cette expression et d'être le seul à braver les tabous, s'est bien gardé d'y recourir à nouveau.

En janvier 2004, lors d'une conversation informelle à l'occasion des voeux à la presse, le chef de l'Etat avait sèchement mis les choses au point : "J'ai dit en conseil des ministres, et je l'ai dit au ministre de l'intérieur, que je n'accepterais plus de mouvement préfectoral où il n'y aurait pas de Français issu de l'immigration." Quant à l'expression "préfet musulman", "je ne l'ai jamais utilisée", avait-il précisé.

Car la religion musulmane n'a rien à voir dans la nomination de M. Meddah, produit de la méritocratie à la française. Ses parents ont quitté l'Algérie dans les années 1950 pour le nord de la France, où le père est devenu ouvrier. A sa mort, la mère a élevé seule ses trois enfants qui sont aujourd'hui préfet, proviseure de lycée et ingénieure en informatique, grâce à leurs études.

Cette nomination consensuelle est aussi destinée à faire oublier l'expérience malheureuse qui avait suivi la nomination d'Aïssa Dermouche, nommé préfet du Jura en janvier 2004, à la suite de la querelle entre le ministre de l'intérieur et le chef de l'Etat. Il avait été victime de deux attentats qui ne l'avaient pas atteint physiquement, puis touché par de graves soucis de santé. L'enquête n'a toujours pas abouti.

Béatrice Gurrey
Article paru dans l'édition du 21.07.06 Le MONDE

Publié dans exemplaireetmeritant

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